Freitag, 6. Juni 2014

« Elections Européennes - Tout doit changer » par Johanna Möhring

Qu'est-ce qui est plus fort qu'une gifle? Ceci se demandent les observateurs politiques en France et à l'étranger à l'issu du scrutin des Européennes dimanche passé. Troisième tour des communales, élections présidentielles anticipées – peu importe l'étiquette qu'on voudrait coller sur la victoire du „Front National“: Les résultats – le FN passe de 6,34 %, son score européen de 2009, à plus de 25 %  comme parti le plus fort sont catastrophiques, et non seulement pour le président français. Selon le ministre de l'Intérieur Manuel Valls, le score record de Marine Le Pen et Ci., le meilleur dans l'histoire du FN longue de 30 ans, est un tremblement de terre politique. Il devrait secouer tous les partis, de gauche aussi bien que de droite, en passant par le centre et les écologistes. 
Beaucoup, beaucoup (trop) de patriotes – plus que 25% des votants ont donné leur voix au Front National (en comparaison les résultats des partis d'extreme droite en Europe via The Economist)
Pendant que l'Elysée affirmait tirer des leçons des résultats électorales, François Hollande, lors d'un discours télévisé lundi se contentait d'annoncer qu'il gardera le cap de sa politique. Ce qui comptait dorénavant était la mise en oeuvre rapide et efficace des reformes déjà entamées et envisagées, notamment une grande reforme de l'organisation territoriale de la France. C'était à l'Europe, et ne pas à la France de changer – plus de croissance, plus de clarté, plus de simplification, ainsi que le retrait de domaines où elle s'avérait inefficace. Position évidemment soutenue par David Cameron lors de la rencontre post-électorale des dirigeants européens mardi à Bruxelles
Message reçu cinquante sept sur cinquante sept pour cent (vu dans les rues de Paris)

Les élections européennes sont un moyen d'exprimer son mécontentement aux urnes – d'une manière ou d'une autre. Apres une campagne plus que mou d'une dizaine de jours, 57% des électeurs (un score semblable à celui de 2009) avaient autre chose à faire que de décider sur la composition du parlement européen, et ainsi, comme le veut le Traité de Lisbon, élire indirectement le président de la future commission. Même les partis europhiles, comme le UDI-MoDem et les Verts ne pouvaient pas mobiliser leur sympathisants. Un message clair, qui n'étonne personne en France. Car l'Europe y est mal-aimée.
„Les peuples n'ont pas entendu les signaux“

Ceux qui se sont déplacés aux urnes* l'ont fait pour sanctionner une Union Européenne qui ne les protège pas en temps de crise. Et pour punir une élite qui depuis 30 ans semble préoccupée principalement par le maintien de ses propres privilèges. L'implosion de UMP sous le poids d'un vaste scandale de financement occulte n'en apparaît comme le dernier exemple. 

Pour beaucoup de français, l'Union Européenne n'est que le bras européen de la mondialisation, d'une construction néolibérale et technocrate. L'Europe n'est pas vécu comme une chance, mais plutôt comme une menace identitaire et sociale. Bousculés par des forces apparemment non-maîtrisés ni à l'échelle nationale, ni à l'échelle européenne, ces français ont parfois le sentiment de ne plus être acteur de leur propre destin. D'autant plus que le système éducatif prépare comparativement moins bien à la compétition internationale
  
Que faire? Déjà dans les années soixante-dix, le sociologue Michel Crozier s'inquiétait des dangers d'une societe bloquée – rigidité bureaucratique et l'absence de participation de la société civile avaient selon lui un effet paralysant sur le pays. Ce problème, bien que parfaitement reconnu depuis, est loin d'être résolu. 
„Servir, sans s’asservir“, la devise de l'ENA 
...et sans se servir?

La question de la mobilité sociale et par son biais, le partage du pouvoir reste elle tout aussi sans réponse. Depuis les années 80, les écoles d'élite, passage encore obligé pour accéder aux postes les plus prestigieuses en politique et en économie, recrutent leurs étudiants de plus en plus parmi la progéniture de leurs alumni. Est-ce un hasard que depuis, la corruption semble prendre des proportions endémiques? La journaliste Sophie Coignard n'est pas la seule à suivre comment depuis trois décades, une partie de la caste politique utilise l'état comme self-service –  en échappant presque toujours à toute sanction. Le triste résultat peut se lire par exemple dans son livre co-edité avec Romain Gubert, „L'Oligarchie des Incapables.“

Bien sur, tout n'est pas pourri dans l'empire de la France, loin de là. La majorité des politiciens et des fonctionnaires servent la France et ses citoyens sans se servir. De jeunes diplômés brillants quittent les écoles et les universités. Des entreprises veulent investir et innover. Mais l'ambiance de stagnation, sur toile de fond d'un changement frénétique tout autour est palpable. Ici réside la clé de lecture du succès du Front National. Une société qui se sent bousculée et bloquée est terrain fertile pour ces forces politiques qui n'ont jamais vraiment accepté les valeurs individuelles démocratiques. Le changement, pour plus de participation et de partage, se doit être maintenant. 

* Le „Front National“ a pu réaliser des scores impressionnants sur tout le territoire national, en dehors de ses bastions traditionnelles dans le sud et à l'est. 43 % des ouvriers qui se sont déplacés aux urnes le 25 mai, 38 % des employés et 37 % des chômeurs ont vote pour lui. 

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