A l'ouest, rien
de nouveau. Malgré le débâcle des cantonales de ce mois de mars – 26
départements anciennement socialistes ont basculé à droite, le „Front National“
a pu renforcer sa stratégie territoriale* - pas de changement de cap en vue à
gauche. En juin aura lieu le congrès du parti socialiste à Poitiers censé
préparer la campagne électorale des présidentielles 2017. Et une majorité
écrasante du parti n'a qu'une envie: mettre
la poussière sous le tapis.
Après à peine
deux ans, le temps des réformes entamées sous les socialistes touche donc
officiellement à sa fin. L'heure est dorénavant à la reconstruction de la
majorité plurielle, au rassemblement des forces de gauche, rituel immanquable
et parfois intellectuellement pénible avant les présidentielles.
Débâcle – UMP détient 66 des 101 départements, abstention plus que 50 pour-cent
(Graphique TV5)
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Les
« départementales » –
élections d'un binôme homme-femme, responsabilités exactes inconnues à
l'heure du scrutin faute de base juridique – ne permettent certes pas de
brosser un portrait politique fiable de la nation française. Mais elles
confirment une tendance inquiétante qui perdure depuis des années, et qui reste
inchangée malgré le sursaut républicain du 11
janvier 2015. Tandis
qu'une majorité des français, lasse et ennuyée, se désintéresse de la
politique, une minorité des citoyens a déclaré la guerre aux partis établis.
Ces 'sans-culottes' de la postmoderne se sentent victimes de la compétition
économique tout en condamnant une paralysie politique vieille de plusieurs
décennies et une supposée perte de repères morales et culturelles.
Marine-Jeanne saura tout arranger
(Photo du 01.05.2013, Le Figaro)
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Bien de citoyens
des pays de l'Union Européenne arborent des sentiments ambigus envers la
mondialisation et son incarnation européenne, le marché unique. Ce qui en soi
n'est pas étonnant étant donné le « trilemme » évoqué par Dani
Rodrik : Démocratie,
souveraineté nationale et globalisation économique se conjuguent résolument
mal, voir pas du tout.
En France, cette
situation est d'autant plus embrouillée. Car selon Laurent Cohen-Tanugi, qui
dans son livre „What's wrong with France?“ dernièrement paru appelle les français à se réinventer de
font en comble, la mondialisation attaque le cœur même de l'identité française.
Elle minerait le socle de son excellence : Centralité d'un état fort à
rayonnement culturel et intellectuel, qui lui serait entouré par une société
homogène confiante en ses institutions démocratiques.
Apparemment beaucoup
De gauche ou de
droite, en France, la compétition est perçue non comme une chance mais comme
une menace pour ses spécificités nationales. Il faut se rappeler que le projet
européen n'a été le fruit d'un compromis d'attentes diamétralement opposées –
entre l'instinct protectionniste des français (on pense notamment à la
politique d'agriculture commune) et la quête des allemands pour un marché
d'exportation.
Comment les
acteurs politiques traditionnels répondent-ils aux perdants de la mondialisation ces
jours-ci? Avec des mots, non avec des actes. Partout en Europe, gauche et
droite confondue, on flirte avec des arguments populistes dans l'espoir de
séduire cet électorat. Ou alternativement, on brandit la menace du
totalitarisme pour faire rentrer dans le rang. Mais pour toutes les familles
politiques établies, rien n'est moins sure que leur capacité d'encore atteindre
le nombre montant des électeurs contestataires.
Les forces
populistes ne se contentent pas d'un dénigrement du combat classique d'idées.
Ils se vantent en outre de leur refus de la politique ancrée dans le réel. Des
faits? Relatifs. Les médias? Achetés. Les institutions démocratiques? Toutes
corrompues. Mais en dehors des conventions de notre vie démocratique, il ne
reste que de l'émotion. Répondre à ce défi n'appartient pas qu'aux partis
établis.
*Certes, le
„Front National“, pénalisé par le scrutin majoritaire n'a pas pu conquérir un
département. Mais il a su multiplier par soixante ses représentants dans les
conseils généraux. La stratégie de Marine Le Pen d'ancrer son parti localement
afin de construire un socle de pouvoir à
long terme semble porter ses fruits: Les électeurs des 11 communes qui ont
depuis mars 2014 un maire frontiste, se sont mobilisés fortement pour le „Front
National“ lors des „Départementales“.